Qui n’a jamais manqué de quelques centimètres pour atteindre une prise, senti des raideurs empêchant les mouvements, bloqué sa respiration là où justement il ne faut pas ou encore connu un manque de concentration… ?
J’ai débuté l’escalade quelques années après le yoga. La souplesse et la force que me procurait ce dernier m’aidaient à pallier mon manque de technique. Au fur et à mesure que j’améliorais mon niveau, je développais parallèlement ma discipline physique et philosophique en yoga. Très vite, j’ai constaté des similitudes mais surtout la complémentarité que cela apportait à ma grimpe.
Ancrage et équilibre
On le sait, tout commence par les pieds : faire le bon placement, l’appui et trouver l’équilibre. En yoga, l’ancrage est un principe de base. Avant toute posture debout et surtout celles d’équilibre, on apprend à sentir l’ancrage, ressentir chaque partie de son corps, l’aligner et engager les muscles nécessaires. Peu de gens ont une connaissance précise interne et dans l’espace de leur corps et pour atteindre la posture, tout comme pour aller à la prochaine prise, il est important de respecter ces étapes.
Souplesse et amplitude des mouvements
La souplesse, c’est la premier bénéfice du yoga auquel on pense. Et la bonne nouvelle, c’est que c’est totalement vrai ! Combien de fois, je n’ai pas remercié le yoga pour cela… Qu’il s’agisse de lever haut la jambe, pouvoir s’étirer en longueur ou en largeur pour atteindre ces fameux centimètres ou encore faire des mouvements improbables en mode économie d’énergie là où je n’en avais plus, là où il faut faire LE mouvement dynamique…
Je ne fus pas peu fière dans cette voie, où tous mes potes me regardaient en se disant « ce mouv là, elle va pas y arriver » et que hop, 2-3 mouvements lents et souples, je le passe l’air de rien.
Renforcement musculaire et gainage
Les asanas (postures), c’est autant des étirements que du renforcement musculaire, utile en grimpe, non pas uniquement pour gagner en force mais pour la protection et prévenir ainsi des blessures. Par exemple, le chien tête en bas (Adho mukha svanasana) est un « classique », elle est pratiquée régulièrement dans la séance, elle renforce les épaules tout en leur procurant une ouverture (que l’on a tendance à fermer lorsque l’on est face à la paroi) ; mais en plus elle étire les muscle ischio-jambiers (arrière des cuisses) et les inversions (tête plus bas que le cœur) permettent au cœur de se reposer et au cerveau d’être mieux irrigué, apportent de l’énergie à tout l’organisme,…
Quant aux planches, intégrées plusieurs fois dans la séance (à commencer dans la Salutation au soleil), il n’est plus nécessaire d’essayer d’en faire chez soi, surtout quand on ne s’y tient jamais …
Adho Adho mukha svanasana – Le chien tête en bas
Respiration
Au début, il peut paraître un peu difficile de s’habituer à la respiration en yoga (pranayama) mais la maîtriser agit sur la performance. Elle permet d’aller plus loin dans la résistance, la force, la souplesse,… En combinant la respiration aux postures (ou aux mouvements on escalade), on apporte l’oxygène nécessaire aux muscles, un bon outil pour éviter d’avoir trop rapidement des « bouteilles » aux avant-bras.
Chaturanga Dandasana – Le bâton à 4 membres
Concentration
Elle est essentielle. En escalade, lorsqu’elle est absente, on tombe plus facilement, on lit moins bien les voies, les placements de pieds et de mains sont moins précis… En yoga, elle n’est pas utilisée que dans les postures d’équilibre, on l’utilise dans les postures statiques pour maintenir la pause mais aussi dans toute autre posture pour se concentrer sur la respiration. L’entrainement de la concentration permet de ne pas se laisser envahir par les pensées, les distractions, elle calme le mental. C’est l’étape avant la méditation, cet état que l’on atteindre également en grimpe. Par la pratique yoga, on apprend à obtenir ces états « sur demande », à ressentir des états de « présence complète ».
Natarajasana – Le danseur
Valeurs éthiques et disciplines morales
Le yoga ne se limite pas aux postures (Asanas), il y huit étapes, degrés (Ashtanga = 8 membres). Les Asanas est le quatrième degré, les deux premiers degrés du yoga sont Yamas (observances morales envers les autres) et Niyamas (règles de vie par rapport à soi-même).
Ce sont des fondements, on les retrouve évidemment en escalade : on grimpe rarement seul et une disciple personnelle est essentielle pour évoluer. On peut les développer davantage en les étudiant et en les pratiquant en yoga. Ainsi, la non-violence nous aidera à connaître et contrôler nos limites physiques pour éviter de se blesser, le contentement peut être utile à ceux qui ont une tendance à râler chaque fois qu’ils échouent,…
Ces principes nous apportent l’humilité et favorisent l’harmonie avec les autres et nous-mêmes.
Quand et comment pratiquer ?
Idéalement tous les jours, mais nos vies et la fréquence des séances d’escalade ne rendent pas la chose possible. Mais il est clair que pour en avoir les bénéfices, il faut une pratique régulière, une fois par semaine, c’est déjà bien.
J’ai remarqué que je grimpais mieux lorsque je faisais une séance de yoga la veille (surtout lorsque j’y intégrais des « ouvertures de hanches ». Juste avant, la salutation est parfaite pour l’échauffement, elle regroupe tous les mouvements, on peut en faire une lentement pour étirer et réveiller les muscles suivie d’une rapide pour un échauffement cardio.
Personnellement je ne fais pas d’étirements intenses juste après afin d’éviter des micro fissures, j’opte pour la posture de l’enfant, en relâchant tous les muscles, juste pour les détendre et le chien tête en bas. Parfois l’un ou l’autre posture mais toujours lentement et en douceur.
Et, je refais une séance de yoga le lendemain ou quelques heures après pour la récupération et les raideurs.
Balasana – L’enfant
Le petit plus…
Je ne crains plus les arrêts pour blessure ou autres raisons et surtout le retour. En remplaçant par du yoga, je ne perds absolument pas mon niveau à la reprise.
Le plus plus…
C’est que ça fait tout simplement du bien !
Si vous n’avez jamais ou peu pratiqué, il est préférable de prendre des cours, afin de connaître l’essence de la posture, quelques centimètres, voire quelques millimètres suffisent à être «en dehors» de la posture. De plus il y a un ordre à respecter, certaines postures ont besoin de contre-postures. Certes, il y a des bons tutoriaux en ligne, mais YouTube ne vous corrigera pas.
Bref, pour monter de niveau, remplacez une séance de grimpe par une de yoga… Cela peut paraître impossible pour certains, mais les effets seront bien présents… A vous d’essayer…
Photos de Yves Dethier - Dyod photography à Itinéraires AMO (Saint-Gilles, Bruxelles)
Thanks God, I'm a Yogini !